22 déc : calendrier de l’avent de nos précaires

Sans accompagnement

J’ai fait ma huitième rentrée en tant que maître délégué en septembre. J’ai travaillé vingt ans dans diverses entreprises avant de me réorienter en lycée professionnel !
Depuis ma première rentrée, on m’a confié des responsabilités sans même me donner les outils nécessaires et minimums. J’ai dû les trouver par moi-même.
Trois mois après avoir intégré l’enseignement, j’ai été inspectée. Jusque-là rien d’étonnant. Sauf que l’inspectrice m’a reproché alors de ne pas avoir de fiche de séquence ou de séance. Quand j’ai fait valoir le fait que je n’avais jamais entendu parler de ces éléments, elle m’a dit que j’aurais pu demander à mes collègues ! Comment poser des questions sur des documents dont on ne soupçonne même pas l’existence. J’avais été embauchée le jour de la pré-rentrée et j’avais découvert des matières aussi originales que PPCP en lisant mon emploi du temps. J’ai dû chercher par moi- même les référentiels. Attention, je ne suis pas en train d’incriminer mes collègues, elles avaient leurs préoccupations et c’est à peine si on nous avait présentés.
J’ai été professeur principal dès le départ, là encore sans formation, sachant qu’en lycée profes- sionnel, le « prof » principal gère de nombreux documents administratifs liés aux PFMP.
Au cours des années, j’ai participé à de nombreux projets, j’ai toujours été « prof » principal et je fais passer les CCF où je vais en correction.


J’ai les mêmes responsabilités que n’importe quel professeur certifié mais je suis maître délégué, ce qui veux dire que tous les ans mon poste peut être attribué à un titulaire qui en fait la demande. Je suis pourtant en CDI mais cela ne me protège pas. J’ai appris que les maîtres délégues en contrat définitif pouvaient être contractualisés, sauf qu’un CDI et un contrat définitif ce n’est pas la même chose pour l’Éducation nationale !
J’ai découvert une fiche de paye incompréhensible et surtout il m’a fallu des années pour savoir ce que pouvait être des HSE, entre autres. Je ne sais jamais de façon sûre le montant de mon pro- chain salaire qui dépend de la date de paiement des AP ou indemnités diverses. Nous sommes en novembre et je n’ai toujours pas ma fiche de salaire de septembre, pratique lorsqu’on te demande de fournir tes trois dernières fiches de salaire.
Je fais tout cela pour un salaire moindre que mes collègues validés et pourtant j’exécute les mêmes tâches. J’ai donc découvert la précarité.
Alors évidemment, vous pouvez me dire que je peux passer les concours externes ou internes. Passer le concours externe, c’est risquer d’être muté, ce qu’à cinquante et un ans je ne souhaite pas. Passer le concours interne nécessite qu’il soit ouvert et quand il l’est, le fait de découvrir qu’il peut y avoir quatre cents candidats pour cinq places est très décourageant. J’enseigne à mes élèves que la VAE existe mais je ne peux pas l’appliquer dans mon domaine.
Pourtant j’aime ce que je fais et j’espère sincèrement pouvoir continuer.